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Imiter : le cycle hagiographique de la nef

Qu’il s’agisse des plafonds peints de Rubens dialoguant avec les peintures surmontant les confessionnaux de la première phase de décoration de l’église au XVIIe siècle, ou bien des lambris des bas-côtés postérieurs à l’incendie de 1718, le cycle iconographique de la nef de l’église Saint-Charles-Borromée favorise le thème hagiographique. La représentation des saints est en effet une composante commune dans les églises jésuites : non seulement elle fonctionne comme une aide à la dévotion mais elle offre aussi aux fidèles des exempla sur lesquels méditer, selon l’idée que l’imitation des actes exemplaires des saints pouvait mener les fidèles à une vie plus pieuse et leur permettre d’accéder au royaume des cieux. 

Avec ses plafonds peints exhibant les saints et les saintes du début de l’ère chrétienne, Rubens propose une alternative à la solution souvent adoptée dans les églises de la Contre-Réforme qui consiste à adosser aux piliers de la nef les statues des apôtres, ceux-ci étant compris comme piliers de l’Église et fonctionnant en ces temps de luttes religieuses comme des modèles à imiter pour les fidèles. Dans ses plafonds peints, en mettant en scène les héros des premiers temps du christianisme avec une perspective da sotto in su, devant un arrière-plan céleste et dans une attitude triomphante du mal, Rubens rappelle aux spectateurs les récompenses spirituelles d’une vie vécue en imitation des saints, résistants aux tentations du diable et combattant l’hérésie. 

En matière d’exempla à imiter, ce qui vaut pour les fidèles vaut également dans une certaine mesure pour les officiants. Aussi, la sacristie, ordinairement réservée aux célébrants, présente-t-elle un plafond en stuc exposant les principaux saints de la Compagnie, auxquels les pères jésuites pouvaient s’identifier lors de la préparation aux offices. Sur les deux travées centrales figurent les médaillons du Nom de Jésus et du Nom de Marie, flanqués respectivement des saints fondateurs (Ignace tenant le livre des Constitutiones et François-Xavier), et de Louis de Gonzague (avec le lys) et Stanislas Kostka (recevant la communion angélique). Sur la travée sud, François Borgia (crâne et couronne) est entouré de la table des pains de consécration et d’une table avec le pain et le vin échangés par Abraham et Melchisédech, des symboles eucharistiques liés à la fonction de la sacristie où sont conservés les vases sacrés et où les ministres du culte se préparaient pour le service divin. Sur la travée nord, les trois martyrs jésuites japonais (Jean Soan de Goto, Paul Miki et Jacques Kisai, tous trois crucifiés à Nagasaki en 1597) sont entourés de deux autres symboles eucharistiques vétérotestamentaires, l’autel du sacrifice et l’Arche de l’Alliance. 

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